Avec la question des communes nouvelles, de la suppression de la taxe d’habitation, (et auparavant de la Taxe Professionnelle mais redistribuée par la communauté de communes) nous pouvons nous interroger sur la manière dont seront faits les futurs budgets communaux.
Yann Le Meur, président de la société d’étude Ressources consultants finances, au contact direct avec certaines collectivités, a donné son « point de vue » dans le Ouest-France du 8 mai 2018. il est un tantinet inquiet….
Des variations de dotations communales
« Les résultats 2018 de la répartition de la dotation globale de fonctionnement (cette DGF versée par l’État aux communes), dont l’enveloppe nationale augmente très légèrement, font apparaître une baisse du montant octroyé pour 47 % des communes françaises. Cette proportion se retrouve peu ou prou selon que l’on observe les grandes (45 %) ou les petites collectivités (47 %). À l’inverse, 53 % des communes tirent leur épingle du jeu.
Des chutes brutales de redistribution
Le problème ne réside pas dans le fait qu’une moitié des communes subit une baisse quand l’autre moitié en bénéficie. Ce phénomène est inhérent à tout système de répartition d’une enveloppe quasi-constante visant pour partie la réduction des inégalités financières. À ce titre, à l’intérieur de la DGF, la dotation de péréquation progresse en 2018 de 4,6 % au détriment de la dotation forfaitaire chutant de 1,8%. On pourrait donc penser à première vue que l’État œuvre efficacement pour réduire les inégalités. Les choses ne sont pas aussi simples!
Ce qui, en réalité; interroge, c’est l’ampleur des redistributions sans causes réelles observées dans un certain nombre de communes. Certaines d’entre elles doivent faire face à des chutes brutales de plus de 10 %, sans raison, leurs critères de richesse fiscale n’ayant pas changé.
Ces chutes brutales de dotations constatées dans de nombreuses communes sont pour une grande part la conséquence de fusions communautaires bénéficiant sans cause à certaines communes au détriment des autres, qui se trouvent aussi bien dans le même groupement intercommunal qu’à, l’autre bout de la France.
Faute d’avoir été bien pensé, un des critères majeurs de calcul des dotations ne résiste pas, surtout depuis la réforme de la taxe professionnelle (TP) en 2011, aux changements de périmètres géographiques ainsi qu’aux transferts de compétences.
II convient, à ce stade, de signaler deux choses. Premièrement, l’État n’a pas écouté les suggestions qui lui étaient faites pour réduire ces effets pervers.
Deuxièmement, comme le phénomène indésirable avait été identifié, il était possible d’estimer au cas par cas son impact. C’était d’autant plus facile que le Ministère mettait à disposition des élus tous les éléments de compréhension et d’analyse des dotations. Mais l’État a décidé d’arrêter de fournir ces variables explicatives ..
Ayant rendu le système opaque, l’État prive volontairement les .élus (à qui l’on demande des efforts) des connaissances indispensables à leur bonne gestion et complique le travail des experts.
Un système opaque
Les questions que se posent les élus sur les facteurs expliquant l’évolution de leurs dotations conduisent à mettre en lumière le scandale que constitue l’organisation de l’opacité du système redistributif. L’État prive les élus des données indispensables à sa compréhension. Espérons que Monsieur Cédric Villani, recommandant avec brio «l’explicativité » des bases de données, trouvera ici matière à faire appliquer sa thèse. »
Yann Le Meur, enseignant à la faculté des sciences économiques de Rennes 1