Les agriculteurs bloquent des routes pour attirer l’attention sur leurs difficultés à se rémunérer. Cette crise des revenus du monde paysan est un symptôme d’une crise plus longue et larvée: la conséquence d’un système économique qui les rend dépendants des grandes entreprises, de la concurrence, et des marchés qui dictent les prix pour leurs produits plus qu’ils ne peuvent les négocier (lactalis, EGALIM: exemples en cours). Cette crise des revenus est un symptôme, le libéralisme la maladie.
N’oublions pas les premières crises, celle de la surproduction du choux-fleur par exemple: elle venait aussi de la demande des techniciens agricoles qui faisait miroiter des revenus faramineux à celui qui allait mettre tous ses œufs dans le même panier et ne faire que massivement un seul produit. Après il y a eu les poulets, les lapins,…
Qu’il y ait des concurrents qui ont moins de contraintes, c’est logique dans ce monde ultralibéral. Vouloir moins de contraintes c’est vouloir accentuer cette concurrence morbide, cette volonté de gagner, qui ne peut satisfaire que les grosses entreprises agricoles et mettre à mal les petits. Dans ces crises, se sont les petits qui disparaissent. Nous assistons à une concentration. Ne leur dit on pas qu’il faut qu’ils grossissent pour survivre ou qu’ils misent sur un produit. Mais où allons nous? Le maraîchage Andalou est en train de tuer sa terre, la mettant à nu, laissera -t-il la place à un désert?
L’impression que nous avons de notre point de vue c’est aussi la différence de revenus suivant les différents secteurs: entre un maraîcher BIO qui doit faire tourner sur ses terres plus de 50 légumes et un maraîcher industriel qui travaille hors sol, sous des serres immenses et qui ne fait que du concombre ou que des tomates dans le pays nantais, les revenus ne sont pas les mêmes et le temps passé n’est pas le même non plus. La spécialisation aurait engendré des inégalités?
Nous arrivons dans cette situation ubuesque où le poulet BIO vendu à Carrefour est vendu moins cher que le poulet d’Ancenis, que le lait BIO est vendu moins cher que le conventionnel…C’est une crise majeure que vit le monde paysan à différents niveaux; il nous semble de notre point de vue qu’il ne suffira pas de soigner le symptôme, il sera nécessaire que le débat soit élargi sur l’avenir des paysans, le modèle agricole, la transmission…
Des entreprises sont prêtes à prendre à bas coût les terres, à prendre le relais et à mettre en place un modèle industriel en salariant de fait les paysans. Certains paysans pourraient être séduits par un nombre d’heures de travail cadrées à 35h, sans la « paperasserie administrative »…La survie du paysan passe peut être aussi par une diversification de ses revenus, ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier; nous avons bien vu que lorsque le concombre est suspecté de porter une bactérie cela peut mettre à mal aussi l’industriel « paysan » qui ne fait que du concombre à l’année…
Cet article n’a pas d’ambition, sinon celui de partager plus un ressenti d’une personne sensible au monde paysan et à ses difficultés. Je vous mets l’interview de la Conf à sa sortie d’avec sa rencontre avec le ministère (jeudi 25 janvier 2024)